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- un cap, ça sert à rien, dit le chien
- c'est bon pour les marins
- ou les mouettes !
- on dirait les pattes d'une grosse bête
- ce sont les pattes des Albères
- les Albères ont-elles des pattes ?
- et pourquoi tout accorder au féminin ?
- parce que les montagnes sont féminines
- et d'ou tu tiens ça toi ?
- tu sais vraiment rien, dit le chien
ce gros papillon (*) venu d'Argentine (ici de profil dans un avocatier) a sa photo dans toutes les mairies
son seul crime est de pondre dans les palmiers où ses larves croissent en boulottant,
ce qui est très mal vu
les municipalités, qui depuis une quinzaine d'années se sont entichées pour ce totem d'agrément sensé incarner la suditude (!) ont mis sa tête à prix
ce papillon est rigolo, impressionnant par sa taille, une dizaine de centimètres d'envergure, son gros ventre, son vol assez peu discret
(on le repère à son flop-flop-flop)
mais qu'il prenne de l'altitude et c'est un oiseau
si on le laissait un peu tranquille ?
après tout le palmier ce n'est qu'une herbe géante
invasive en quelque sorte puisqu'elle a remplacé nos érables, nos tilleuls, nos marronniers
ah, rendez-nous nos marronniers !
(*) Paysandisia archon
j'ai toujours trouvé une certaine beauté aux épaves
dans la jungle (cela vient) des Albères ou ailleurs
et c'était bien avant de découvrir la psychosexualité développée par James Ballard dans Crash !, un auteur que je recommande par ailleurs
non, cela date de mon premier job aux garages
et puis cela enrichit notre
trouble attrait pour le post-apocalyptisme
(et pendant que j'écris cela volent les hirondelles dans mon "bourreau"...et en plus elles parlent !)
ce terreau (forcément fertile) de notre culpabilité, de notre imposture d'espèce
fin de l'Histoire, fin
de l'automobile...point
fin d'une époque assurément, celle des doigts d'or qui démontaient les carbus, les cylindres
fin de ces mécanos magnifiques qui redonnaient vie et compression à nos berlunes, à nos titines...
les bagnoles de demain seront robotes
obeïssant au doigt et à l'oeil de leurs maîtres
en serons-nous ?
et
nous pourrons nous embrasser à pleine bouche sur ces nouvelles autoroutes
pour l'instant, je vous le rappelle, c'est interdit...
... dans le parc naturel de l'Albera, pas très loin du col de Banyuls...
là, comme posée et venant de nulle part
au milieu du maquis plié par les vents...
Saint Quirze de Colera fait partie de ce chapelet d'abbayes bénédictines nées dans le sillage des armées de Charlemagne des deux côtés des Albères à la fin du VIIIe siècle. L'idée, je crois était de poser des phares, des balises pour éclairer les temps obscurs...
L'abbaye est gardée par un troupeau de vaches pacifiques et par de gros lézards verts qui se propulsent en se dandinant, la tête haut levée
il doit bien y avoir également quelques tortues d'Hermann puisque nous sommes dans leur sanctuaire de reproduction.
Façades austères de pierre sombre nous rappellent
que la religion n'est (n'était ?) pas faite
pour (et par ?) des rigolos
et puis en plus c'est fermé
heureusement, des voix s'échappent du corral (la cantina), il paraît que c'est un ancien poulailler
Pour Feuilly
qui a croisé ce canal
dans sa version "épurée"...
