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  • le temps du tilleul

    DSCN1996.JPGeh bien justement j'avais prévu de visiter ce tilleul en bordure de correc juste sous le Mas Bordes, d'habitude j'y passais plutôt début Juin, mais là avec ces grosses chaleurs...et l'arbre était à point, couvert de petites fleurs blanches, on le sent avant de le voir

    elle m'a dit c'est la saison du tilleul mais plus personne ne va le cueillir maintenant, avant on connaissait le bon moment pour y aller, on surveillait celui qui était à l'entrée du village après le pont vous savez la maison isolée et quand il était en fleurs on savait qu'il nous restait une bonne semaine avant de monter

    et l'orage grondait déjà dans le Vallespir, le ciel était noir à l'Ouest comme en été, c'est délicat le tilleul, un peu avant et cela ne donne rien qu'un jus amer, un peu après et c'est déjà trop tard

    il dit mes jambes elles valent plus rien mais avant je connaissais tous les rochers et jusqu'en haut. Il a 80 ans et ses longues jambes plient et peinent à porter son grand corps mais tout est encore vif en lui il pétille. Je mesure comme cela doit être difficile d'avoir la montagne à côté plus que pour les yeux et le souvenir des grandes enjambées.

    nos petits sacs se remplissent les fleurs sont douces au toucher le ciel craque c'est encore loin

    et bien sûr nous parlons des oiseaux des pinsons qu'on ne voit plus des chardonnerets nombreux cette année des perruches qui remontent du sud, j'étais passé les voir avant la sieste, ils habitent tous les deux la mer pavillonnaire, la mort lente, rien ne bouge sous le soleil et toutes ces fleurs riches des catalogues...

     

    il y a des colonies de petites mouches rousses avec de longues ailes et un curieux appendice, presque une queue et des centaines d'abeilles, l'air bourdonne le coton colle à la peau et déjà les premières gouttes, vite avant que la pluie ne déchire nos sacs en papier

     

  • le cannabis et la mouche

    Deux cèdres -forcement majestueux- montent la garde dans une symétrie parfaite de chaque côté du bâtiment de l'administration. Hôpital suburbain, c'est écrit au fronton. Pour certains, l'hôpital est la ville mais je préfère renverser la proposition.

    J'ajuste mon scaphandre et je sors. Place Baylac, la patronne des roms houspille ses troupes armées de brosses et de seaux. Je descends l'avenue de Grande-Bretagne avec ses friches industrielles, les arsenaux et les usines d'armement laissent la place à d'autres usines de divertissement, prochainement ici un éco-quartier mais où sont les oiseaux ? Place d'Alsace-Lorraine je me mêle un instant à la marche mondiale du cannabis et je me demande ce que donnerait un défilé d'opiomanes, du reste pourquoi réclamer ce qui ne demande qu'à pousser...

    tout va bien cette ville n'était qu'une parenthèse et nous sommes de retour. Levé tôt, je suis assis avec Joan sous le grand platane de la place. Il avait 9 ans lorsqu'il est arrivé au village par le col de l'Ouillat, un jour de février 1939 puis j'achète quelques cerises à la mémé puisque les miennes héhé

    elle en veut à l'Europe, à ses règlements idiots, cette année la coopérative a refusé toutes les cerises non calibrées, calibre 24 ! elle a cent arbres

    et puis je remonte avec Gaston qui passait par là avec sa sulfateuse. Gaston, c'est le grand jardinier, il me raconte que cette année la burlat était piquée, la faute à une mouche, une mouche chinoise ! notre monde est devenu tout petit

  • Einstein sur le rivage

    DSCN1976.JPGje n'en avais pas fini avec le Ravaner, il devait y avoir une suite, un Ravaner 2 avec cascades et effets spéciaux tandis que résonnaient les cloches pascales

    tournant le dos aux Albères et filant vers la mer pour la dernière partie de son cours, le tranquille petit fleuve côtier emprunte un méchant tunnel de tôle ondulée sous la quatre-voies

    un trou de vers, que dis-je, un pont d'Einstein-Rozen

    les années passent et je suis toujours aussi fasciné par la théorie de la relativité, ma piètre formation scientifique fait qu'elle constitue surtout pour moi une machine à rêve

    or, ce jour-là les trous de vers me chagrinaient, comment et pourquoi la nature d'ordinaire si indifférente à nos petites affaires créerait-elles des singularités spacio-temporelles, des sortes de raccourcis qui ne lui servaient à rien...j'y voyais surtout une vicieuse intentionnalité, une résurgence de ce fameux principe anthropique derrière lequel se cachait le bienveillant Grand Horloger et tout se serait terminé en eau de boudin et la note avec si...

    l'autre jour au passage d'un gué mon attention fut illico aspirée vers un bruit incongru

    là, à fleur de gué un vortex me renvoyait à la figure sa déglutition d'évier, cette trombe sous-marine accompagnée de son souffle de vidange se prolongeait sous le gué guère plus grosse qu'un petit doigt.

    Elle ne durait que quelques secondes et semblait apparaître spontanément à la confluence de paramètres aussi divers que la vitesse du courant, la hauteur de l'eau, les différence de niveau entre l'entrée et la sortie du gué

    un instant je me suis senti comme Newton sans la pomme, je tenais mon trou de vers in-vivo

    et finalement, rappelez à vous ce beau roman de Murakami "Kafka sur le rivage" et cet épisode sur la pluie de poisson en centre-ville

    ils avaient, à leur manière, emprunté un autre de ces trous de vers que nous avons sous les yeux

    nomdedieudenomdedieu